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    Complainte des pianos qu'on entend dans les quartiers aisés

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    GODOF
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    Complainte des pianos qu'on entend dans les quartiers aisés Empty Complainte des pianos qu'on entend dans les quartiers aisés

    مُساهمة من طرف GODOF الأحد 30 أغسطس - 11:11



    Menez l'âme que les Lettres ont bien nourrie,
    Les pianos, les pianos, dans les quartiers aisés !
    Premiers soirs, sans pardessus, chaste flânerie,
    Aux complaintes des nerfs incompris ou brisés.

    Ces enfants, à quoi rêvent-elles,
    Dans les ennuis des ritournelles ?

    " Préaux des soirs,
    Christs des dortoirs !

    " Tu t'en vas et tu nous laisses,
    Tu nous laiss's et tu t'en vas,
    Défaire et refaire ses tresses,
    Broder d'éternels canevas. "

    Jolie ou vague ? triste ou sage ? encore pure ?
    Ô jours, tout m'est égal ? ou, monde, moi je veux ?
    Et si vierge, du moins, de la bonne blessure,
    Sachant quels gras couchants ont les plus blancs aveux ?

    Mon Dieu, à quoi donc rêvent-elles ?
    A des Roland, à des dentelles?

    - " Coeurs en prison,
    Lentes saisons !

    " Tu t'en vas et tu nous quittes,
    Tu nous quitt's et tu t'en vas !
    Couvent gris, choeurs de Sulamites,
    Sur nos seins nuls croisons nos bras. "

    Fatales clés de l'être un beau jour apparues ;
    Psitt ! aux hérédités en ponctuels ferments,
    Dans le bal incessant de nos étranges rues ;
    Ah ! pensionnats, théâtres, journaux, romans !

    Allez, stériles ritournelles,
    La vie est vraie et criminelle.

    " Rideaux tirés,
    Peut-on entrer?

    " Tu t'en vas et tu nous laisses,
    Tu nous laiss's et tu t'en vas,
    La source des frais rosiers baisse,
    Vraiment ! Et lui qui ne vient pas... "

    Il viendra ! Vous serez les pauvres coeurs en faute,
    Fiancés au remords comme aux essais sans fond,
    Et les suffisants coeurs cossus, n'ayant d'autre hôte
    Qu'un train-train pavoisé d'estime et de chiffons.

    Mourir ? peut-être brodent-elles,
    Pour un oncle à dot, des bretelles ?

    "- Jamais ! Jamais !
    Si tu savais!

    " Tu t'en vas et tu nous quittes,
    Tu nous quitt's et tu t'en vas,
    Mais tu nous reviendras bien vite
    Guérir mon beau mal, n'est-ce pas? "

    Et c'est vrai ! l'Idéal les fait divaguer toutes,
    Vigne bohème, même en ces quartiers aisés.
    La vie est là ; le pur flacon des vives gouttes
    Sera, comme il convient, d'eau propre baptisé.

    Aussi, bientôt, se joueront-elles
    De plus exactes ritournelles.

    " - Seul oreiller !
    Mur familier !

    " Tu t'en vas et tu nous laisses,
    Tu nous laiss's et tu t'en vas.
    Que ne suis-je morte à la messe !
    Ô mois, ô linges, ô repas ! "

    Auteur:Jules LAFORGUE


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