Candide, ou l’Optimisme est un conte philosophique de Voltaire paru à Genève en janvier 1759. Il a été réédité vingt fois du vivant de l’auteur (plus de cinquante aujourd’hui) ce qui en fait un des plus grands succès littéraire français.
Anonyme en 1759, Candide est attribué à un certain « Monsieur le Docteur Ralph » en 1761, à la suite du remaniement du texte par Voltaire. Ce titre ronflant donne tout de suite le ton au lecteur qui pourrait hésiter sur le genre de l’ouvrage : conte ou essai ? Art mineur ou art noble ? L’auteur prend, dès les premières lignes, position contre la noblesse aux titres bien plus ronflants que celui-ci. Et que dire du nom du soi-disant docteur Ralph ? Rien de plus qu’une onomatopée qui ne laisse aucun doute sur le ton de cette œuvre (voir Thunder-Ten-Tronckh, le château de la situation initiale). Cette œuvre si ironique dès les premières lignes, ne laisse aucun doute sur l’origine de l’auteur, qui ne pouvait faire partie que des Lumières. Et de là à penser à Voltaire, le doyen des Philosophes, pour le lecteur du XVIIIe siècle, il n’y a qu’un pas. Le plus achevé des contes de Voltaire, il s’agit également d’un roman de formation.
Le mot « candide » vient du latin candidus qui signifie blanc : une des interprétations possibles du nom est l’expression de l’innocence, voire la naïveté du
cette époque, Voltaire vit dans la propriété des Délices à Genève, véritable « palais d’un philosophe avec les jardins d’Épicure »[1]. Deux événements l’ont récemment bouleversé : le tremblement de terre de Lisbonne du 1er novembre 1755 et le début de la guerre de Sept Ans (1756) qui lui inspirent cette réflexion : « Presque toute l’histoire est une suite d’atrocités inutiles » (Essai sur l’histoire générale, 1756).
Ayant envoyé son Poème sur le désastre de Lisbonne à Jean-Jacques Rousseau, celui-ci lui répond par une lettre dans laquelle il cherche à justifier la divine providence, dont Voltaire doute fortement après ces évènements. Il prétend, dans le neuvième livre de ses Confessions, que le roman philosophique Candide serait la réponse à cette lettre, réponse que Voltaire avait promise tout en l’ajournant.
De plus, l’année précédant la publication de cet ouvrage, l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, à laquelle participait Voltaire, connaît un coup d’arrêt par le retrait du privilège royal et la condamnation prononcée par le Parlement de Paris. Voltaire aurait donc trouvé, avec Candide, un moyen de continuer à transmettre les idéaux des Lumières. But d’ailleurs amplement atteint, vu le succès de ce livre qui, au lieu de ne toucher qu’une élite fortunée et cultivée comme le faisait l’Encyclopédie, a touché presque tous les lettrés.
Depuis sa retraite suisse, Voltaire parcourt la planète en imagination. Peu à peu, il dessine certains axes dans un espace symbolique : Berlin et l’Allemagne au Nord ; le Pérou à l’Ouest, Venise au Sud, Constantinople à l’Est. Ce sont déjà les lieux principaux du conte, les grandes étapes du voyage initiatique de Candide. Il reste à les relier : l’Allemagne, par exemple, est liée par un même despotisme à la Turquie et à l’Amérique du Sud par les jésuites allemands qui font la guerre au Paraguay. Les chemins sont maintenant tracés et les personnages peuvent prendre la route. Il faut bien sûr créer Candide…
Candide, personnage principal de Candide, bâtard de la sœur de monsieur le baron Thunder-ten-tronckh, « l’esprit le plus simple » dont la « physionomie annonçait son âme ».
Baron Thunder-ten-tronckh, hobereau westphalien.
Baronne Thunder-ten-tronckh, sa femme, très considérée pour les « trois cent cinquante livres » qu’elle pèse.
Le fils du baron Thunder-ten-tronckh, jésuite entiché de sa noblesse.
Cunégonde, fille du baron Thunder-ten-tronckh, cousine et amoureuse de Candide. Peut-être imaginée à partir des deux maîtresses de Voltaire : sa nièce Marie Louise Mignot Denis et la scientifique, Émilie du Châtelet.
Pangloss, professeur de métaphysico-théologo-cosmolo-nigologie, précepteur de Candide et de Cunégonde. Peut-être imaginé à partir de la duchesse de Saxe-Gotha, Louisa Dorothea von Meiningen, une leibnizienne avec qui Voltaire a beaucoup correspondu.
Paquette, femme de chambre de la baronne Thunder-ten-tronckh et bénéficiaire accessoire des « leçons de physique expérimentale » du savant Dr. Pangloss.
Cacambo, valet de Candide. La scatologie est manifeste.
Martin, compagnon manichéen de voyage de Candide. Certains critiques pensent que Martin est traité avec sympathie, ce qui signifierait que la philosophie idéale de Candide est pessimiste, ce que d’autres contredisent en citant la description négative de Voltaire des principes de Martin et la fin de l’histoire où Martin devient passif.
La vieille, bienfaitrice de Cunégonde, évocation des marraines des contes traditionnels.
Jacques l’anabaptiste, bienfaiteur hollandais de Candide au début du conte jusqu’à sa noyade après avoir sauvé un autre homme.
Vanderdendur, négociant escroc
Candide vivait paisible et innocent chez le baron de Thunder-ten-tronckh, en Westphalie. Dans son château, le précepteur Pangloss (« qui discourt de tout » en grec), représentation de Gottfried Leibniz, professait un optimisme béat. Candide partageait cette plénitude d’autant plus qu’il était amoureux de Cunégonde, fille du baron. Un jour, ce même baron surprend leurs amours et chasse Candide à coups de pied « dans le derrière ».
Son existence ne sera plus qu’une suite de malheurs. Enrôlé de force, il assiste à une horrible bataille, déserte et passe en Hollande. Il y retrouve son précepteur rongé d’une affreuse maladie, la vérole, et apprend que tous les habitants du château ont été massacrés. Recueillis par un bon anabaptiste, ils arrivent à Lisbonne juste au moment du terrible tremblement de terre ; le navire fait naufrage, leur bienfaiteur est noyé : la Providence n’épargne qu’un criminel… Les deux hommes errent parmi les cadavres et les décombres ; une parole imprudente les fait condamner par l’Inquisition. Pangloss est pendu ; Candide en sera quitte pour être seulement « prêché, fessé, absous et béni », après quoi il retrouve Cunégonde, qui a miraculeusement échappé au massacre de sa famille lors de l’invasion des Bulgares. Il est alors amené à tuer le grand Inquisiteur et un Juif, qui se partageaient Cunégonde comme prostituée, et s’enfuit en Amérique. Il doit abandonner Cunégonde et se réfugie auprès des Jésuites du Paraguay dont le colonel n’est autre que le frère de Cunégonde, lui aussi survivant. Pourtant, une dispute s’élève entre lui et Candide, qui pour la troisième fois meurtrier, pourfend son adversaire.
Il échappe de justesse aux sauvages Oreillons et séjourne au merveilleux pays d’Eldorado où les cailloux sont des diamants. Il en repart comblé de trésors, qu’il perdra en grande partie durant son périple pour rejoindre la Guyane hollandaise (actuel Suriname) où il rencontre un pauvre esclave. Il cherchait à sélectionner l’homme « le plus malheureux de la province » et c’est Martin, exact opposé de Pangloss dans sa pensée, qui lui conte ses malheurs. Après bien d’autres mésaventures, il arrive à Venise où il dîne avec six rois détrônés, venus au Carnaval oublier leurs déboires. À Constantinople, il libère Pangloss miraculeusement sauvé, mais devenu galérien et le frère de Cunégonde, survivant de la rixe qui les avait opposés, lui aussi galérien. Candide ruiné par la rançon demandée et par bien d’autres escroqueries, retrouve enfin Cunégonde enlaidie et aigrie par ses malheurs (en Propontide) ; il l’épouse néanmoins et s’installe avec ses compagnons dans une métairie où, renonçant à « pérorer », ils seront heureux grâce au travail qui éloigne selon Voltaire « trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin ».
Le refrain résolument optimiste de Pangloss sur « le meilleur des mondes possibles », ainsi que le mot de la fin de Candide :
« Pangloss disait quelquefois à Candide : “Tous les événements sont enchaînés dans le meilleur des mondes possibles ; car enfin si vous n’aviez pas été chassé d’un beau château à grands coups de pied dans le derrière pour l’amour de mademoiselle Cunégonde, si vous n’aviez pas été mis à l’Inquisition, si vous n’aviez pas couru l’Amérique à pied, si vous n’aviez pas donné un bon coup d’épée au baron, si vous n’aviez pas perdu tous vos moutons du bon pays d’Eldorado, vous ne mangeriez pas ici des cédrats confits et des pistaches.
– Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin.” »
Anonyme en 1759, Candide est attribué à un certain « Monsieur le Docteur Ralph » en 1761, à la suite du remaniement du texte par Voltaire. Ce titre ronflant donne tout de suite le ton au lecteur qui pourrait hésiter sur le genre de l’ouvrage : conte ou essai ? Art mineur ou art noble ? L’auteur prend, dès les premières lignes, position contre la noblesse aux titres bien plus ronflants que celui-ci. Et que dire du nom du soi-disant docteur Ralph ? Rien de plus qu’une onomatopée qui ne laisse aucun doute sur le ton de cette œuvre (voir Thunder-Ten-Tronckh, le château de la situation initiale). Cette œuvre si ironique dès les premières lignes, ne laisse aucun doute sur l’origine de l’auteur, qui ne pouvait faire partie que des Lumières. Et de là à penser à Voltaire, le doyen des Philosophes, pour le lecteur du XVIIIe siècle, il n’y a qu’un pas. Le plus achevé des contes de Voltaire, il s’agit également d’un roman de formation.
Le mot « candide » vient du latin candidus qui signifie blanc : une des interprétations possibles du nom est l’expression de l’innocence, voire la naïveté du
cette époque, Voltaire vit dans la propriété des Délices à Genève, véritable « palais d’un philosophe avec les jardins d’Épicure »[1]. Deux événements l’ont récemment bouleversé : le tremblement de terre de Lisbonne du 1er novembre 1755 et le début de la guerre de Sept Ans (1756) qui lui inspirent cette réflexion : « Presque toute l’histoire est une suite d’atrocités inutiles » (Essai sur l’histoire générale, 1756).
Ayant envoyé son Poème sur le désastre de Lisbonne à Jean-Jacques Rousseau, celui-ci lui répond par une lettre dans laquelle il cherche à justifier la divine providence, dont Voltaire doute fortement après ces évènements. Il prétend, dans le neuvième livre de ses Confessions, que le roman philosophique Candide serait la réponse à cette lettre, réponse que Voltaire avait promise tout en l’ajournant.
De plus, l’année précédant la publication de cet ouvrage, l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, à laquelle participait Voltaire, connaît un coup d’arrêt par le retrait du privilège royal et la condamnation prononcée par le Parlement de Paris. Voltaire aurait donc trouvé, avec Candide, un moyen de continuer à transmettre les idéaux des Lumières. But d’ailleurs amplement atteint, vu le succès de ce livre qui, au lieu de ne toucher qu’une élite fortunée et cultivée comme le faisait l’Encyclopédie, a touché presque tous les lettrés.
Depuis sa retraite suisse, Voltaire parcourt la planète en imagination. Peu à peu, il dessine certains axes dans un espace symbolique : Berlin et l’Allemagne au Nord ; le Pérou à l’Ouest, Venise au Sud, Constantinople à l’Est. Ce sont déjà les lieux principaux du conte, les grandes étapes du voyage initiatique de Candide. Il reste à les relier : l’Allemagne, par exemple, est liée par un même despotisme à la Turquie et à l’Amérique du Sud par les jésuites allemands qui font la guerre au Paraguay. Les chemins sont maintenant tracés et les personnages peuvent prendre la route. Il faut bien sûr créer Candide…
Candide, personnage principal de Candide, bâtard de la sœur de monsieur le baron Thunder-ten-tronckh, « l’esprit le plus simple » dont la « physionomie annonçait son âme ».
Baron Thunder-ten-tronckh, hobereau westphalien.
Baronne Thunder-ten-tronckh, sa femme, très considérée pour les « trois cent cinquante livres » qu’elle pèse.
Le fils du baron Thunder-ten-tronckh, jésuite entiché de sa noblesse.
Cunégonde, fille du baron Thunder-ten-tronckh, cousine et amoureuse de Candide. Peut-être imaginée à partir des deux maîtresses de Voltaire : sa nièce Marie Louise Mignot Denis et la scientifique, Émilie du Châtelet.
Pangloss, professeur de métaphysico-théologo-cosmolo-nigologie, précepteur de Candide et de Cunégonde. Peut-être imaginé à partir de la duchesse de Saxe-Gotha, Louisa Dorothea von Meiningen, une leibnizienne avec qui Voltaire a beaucoup correspondu.
Paquette, femme de chambre de la baronne Thunder-ten-tronckh et bénéficiaire accessoire des « leçons de physique expérimentale » du savant Dr. Pangloss.
Cacambo, valet de Candide. La scatologie est manifeste.
Martin, compagnon manichéen de voyage de Candide. Certains critiques pensent que Martin est traité avec sympathie, ce qui signifierait que la philosophie idéale de Candide est pessimiste, ce que d’autres contredisent en citant la description négative de Voltaire des principes de Martin et la fin de l’histoire où Martin devient passif.
La vieille, bienfaitrice de Cunégonde, évocation des marraines des contes traditionnels.
Jacques l’anabaptiste, bienfaiteur hollandais de Candide au début du conte jusqu’à sa noyade après avoir sauvé un autre homme.
Vanderdendur, négociant escroc
Candide vivait paisible et innocent chez le baron de Thunder-ten-tronckh, en Westphalie. Dans son château, le précepteur Pangloss (« qui discourt de tout » en grec), représentation de Gottfried Leibniz, professait un optimisme béat. Candide partageait cette plénitude d’autant plus qu’il était amoureux de Cunégonde, fille du baron. Un jour, ce même baron surprend leurs amours et chasse Candide à coups de pied « dans le derrière ».
Son existence ne sera plus qu’une suite de malheurs. Enrôlé de force, il assiste à une horrible bataille, déserte et passe en Hollande. Il y retrouve son précepteur rongé d’une affreuse maladie, la vérole, et apprend que tous les habitants du château ont été massacrés. Recueillis par un bon anabaptiste, ils arrivent à Lisbonne juste au moment du terrible tremblement de terre ; le navire fait naufrage, leur bienfaiteur est noyé : la Providence n’épargne qu’un criminel… Les deux hommes errent parmi les cadavres et les décombres ; une parole imprudente les fait condamner par l’Inquisition. Pangloss est pendu ; Candide en sera quitte pour être seulement « prêché, fessé, absous et béni », après quoi il retrouve Cunégonde, qui a miraculeusement échappé au massacre de sa famille lors de l’invasion des Bulgares. Il est alors amené à tuer le grand Inquisiteur et un Juif, qui se partageaient Cunégonde comme prostituée, et s’enfuit en Amérique. Il doit abandonner Cunégonde et se réfugie auprès des Jésuites du Paraguay dont le colonel n’est autre que le frère de Cunégonde, lui aussi survivant. Pourtant, une dispute s’élève entre lui et Candide, qui pour la troisième fois meurtrier, pourfend son adversaire.
Il échappe de justesse aux sauvages Oreillons et séjourne au merveilleux pays d’Eldorado où les cailloux sont des diamants. Il en repart comblé de trésors, qu’il perdra en grande partie durant son périple pour rejoindre la Guyane hollandaise (actuel Suriname) où il rencontre un pauvre esclave. Il cherchait à sélectionner l’homme « le plus malheureux de la province » et c’est Martin, exact opposé de Pangloss dans sa pensée, qui lui conte ses malheurs. Après bien d’autres mésaventures, il arrive à Venise où il dîne avec six rois détrônés, venus au Carnaval oublier leurs déboires. À Constantinople, il libère Pangloss miraculeusement sauvé, mais devenu galérien et le frère de Cunégonde, survivant de la rixe qui les avait opposés, lui aussi galérien. Candide ruiné par la rançon demandée et par bien d’autres escroqueries, retrouve enfin Cunégonde enlaidie et aigrie par ses malheurs (en Propontide) ; il l’épouse néanmoins et s’installe avec ses compagnons dans une métairie où, renonçant à « pérorer », ils seront heureux grâce au travail qui éloigne selon Voltaire « trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin ».
Le refrain résolument optimiste de Pangloss sur « le meilleur des mondes possibles », ainsi que le mot de la fin de Candide :
« Pangloss disait quelquefois à Candide : “Tous les événements sont enchaînés dans le meilleur des mondes possibles ; car enfin si vous n’aviez pas été chassé d’un beau château à grands coups de pied dans le derrière pour l’amour de mademoiselle Cunégonde, si vous n’aviez pas été mis à l’Inquisition, si vous n’aviez pas couru l’Amérique à pied, si vous n’aviez pas donné un bon coup d’épée au baron, si vous n’aviez pas perdu tous vos moutons du bon pays d’Eldorado, vous ne mangeriez pas ici des cédrats confits et des pistaches.
– Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin.” »